Le Conservatoire National du Saumon Sauvage - Un rempart face à l’extinction dans les Gorges du Haut-Allier

Gorges du Haut-Allier
30 juin
4 min de lecture

A l’entrée des gorges de l’Allier, le village de Chanteuges est le siège du Conservatoire National du Saumon Sauvage (CNSS). Véritable bastion pour la survie de la souche Loire-Allier (une sous-espèce du saumon sauvage de l'Atlantique) il œuvre depuis 2001 à repeupler la dernière rivière sauvage.

La remontée du saumon — © Drew Farwell (banc photo Unsplash)

🐟 Pourquoi agir ?

Le saumon sauvage de l’Allier peut encore parcourir près de 1000 km depuis l’océan pour aller frayer. Mais sa population a chuté de façon dramatique : –76 % entre 1970 et 2016.

En 2024, l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) a classé la souche Loire‑Allier en « danger d’extinction ». Seulement une douzaine de géniteurs a atteint la station de comptage de Vichy au printemps 2024.

Les causes sont multiples : barrages, dérèglements climatiques, températures estivales dépassant régulièrement les 25 °C, seuil critique pour le saumon.

Pourtant, de nombreuses mesures ont été mises en œuvre ces dernières décennies pour tenter de sauvegarder ce poisson emblématique du patrimoine naturel français. Le barrage EDF de Poutès a été entièrement réaménagé pour permettre le passage des poissons migrateurs (installation de l’un des premiers ascenseurs à poissons de France en 1986), tout comme plusieurs seuils infranchissables à étiage, désormais équipés de "passes à poissons".

La pêche au saumon a été totalement interdite sur le bassin Loire-Allier depuis 1994.

💧 Le rôle du Conservatoire National du Saumon Sauvage à Chanteuges

Depuis son inauguration en 2001, la salmoniculture de Chanteuges, la plus grande d’Europe dédiée au repeuplement, joue un rôle central dans la sauvegarde du saumon sauvage de l’Allier. Le Conservatoire National du Saumon Sauvage (CNSS) y mène un travail minutieux : des géniteurs sont capturés en amont, à hauteur de Vichy, afin d’extraire œufs et sperme. Dans un immense hangar-bois, 150 bassins reconstruisent fidèlement l’environnement naturel du saumon atlantique, offrant un cadre optimal pour la croissance des jeunes poissons. Les jeunes saumons, appelés smolts, sont ainsi élevés dans des conditions rigoureusement contrôlées avant d’être relâchés en rivière. Les techniques d’élevage utilisées sont particulièrement sophistiquées. Elles reposent sur l’usage d’eau brute filtrée, un taux de renouvellement élevé et un cycle lumineux reproduisant les conditions naturelles. Chaque année, environ 200 000 smolts sont produits, auxquels s’ajoutent entre 300 000 et 400 000 alevins relâchés au printemps. Sans cette stratégie de reproduction assistée, les experts estiment que la souche Allier du saumon sauvage pourrait s’éteindre en seulement trois à quatre ans.

💡 Le conservatoire, un lieu de sensibilisation

Le Conservatoire National du Saumon Sauvage de Chanteuges représente un exemple fort de conservation engagée, où se rencontrent la science, la pédagogie et la mobilisation collective. Si les efforts de repeuplement ont permis jusqu’ici de freiner le déclin du saumon sauvage, sa survie à long terme repose avant tout sur des actions structurelles profondes, mais aussi sur l’implication du grand public. Chaque visite, chaque geste de soutien ou initiative locale contribue concrètement à la sauvegarde de ce symbole vivant de nos rivières.

Ouvert toute l’année sur réservation (tel. 06 63 49 59 55), avec visites guidées pour groupes et scolaires, le site propose aussi, en juillet‑août, des créneaux réguliers les mardis et jeudis à 15h et les samedis à 10h. Comptez environ 1h30 pour la visite.Au programme : découverte du cycle migratoire, de la smoltification, et immersion dans la salle des géniteurs.

Aquarelle du Conservatoire du Saumon Sauvage

Créer, transmettre, raconter - Un printemps d’ateliers autour du saumon sauvage

Au fil des mois d’avril et mai, une série d’ateliers et d’animations a fait vivre le projet « Une vie de saumon » au cœur du territoire. Ces rencontres artistiques et pédagogiques ont permis de tisser des liens entre création, écologie et transmission. En avril, les enfants de l’ALSH de Saugues ont retrouvé Les Brindilleuses pour un second atelier mêlant travail de l’osier et feutrage de laine, tandis que des habitants de Pébrac réalisaient des masques-poisson dans un esprit de transmission artisanale. L’équipe de Musikenjeu a rassemblé choristes, comédiens et musiciens pour un stage intensif conclu par une représentation collective à Chanteuges, autour du cycle migratoire du saumon.

En mai, une création sonore et plastique a pris forme avec des collégiens de Langeac et Saugues, accompagnés par Apolline Roy, Julien Baur et Camille Grosperrin, pour une future exposition consacrée aux frayères. En parallèle, Paul Pajot, illustrateur en résidence à La Belle Étoile, a lancé une série de rencontres en milieu scolaire et associatif avec Pierre Ribeyre, qui donneront lieu à des ateliers approfondis autour du film d’animation.

L’artiste Cécile Auréjac a initié les élèves de Pinols à la fabrication de billes d’argile végétales, destinées à reverdir les rives de l’Allier lors d’un lâcher collectif en juillet.

Enfin, chaque mardi d'avril et mai, un atelier théâtre inclusif a réuni la troupe Les Uns Possibles de l’Adapei et des participants du CADA, guidés par Marie Jouve, pour explorer en scène le parcours du saumon comme métaphore de résilience et de transformation.